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Shhrzde
24 octobre 2007

Re: Lava bombs

(Episode 58)

                              From: Bruno Tschinag
                              Sent: Dimanche 21 Novembre
                              To: Solentiname Tschinag 

Hej hej Soli,

Je crois que je porte la poisse. Je suis tout pantelant de trouille. Je sais, t'es habitué. J'ai encore été mettre les pattes où j'aurais pas dû. J'étais un peu déçu que Mariën m'ait largué direct à l'arrivée à l'hôtel pour aller préparer son tête à tête avec son boss demain pour préparer leur réunion de direction après demain. Tu sais comme bien j'aime pas faire des trucs tout seul dans mon coin, partager avec une troupe, une bande de potes, ma douce ça démultiplie tellement le plaisir. Bref, j'ai demandé au gars de la réception une idée pour pas passer la soirée vautré sur la couverture beige du grand lit face à la télé. Assez sympa le boyz de la réception, on blague un peu, il me demande combien de femmes j'ai épousé, il a l'air vraiment déçu que je bafouille, interloqué par sa question. Je dis : une seule qui compte vraiment, enfin en ce moment c'est compliqué. Bon, je sens que ça va dériver, qu'il va me proposer des plans foireux pour étoffer ma collection de compagnes. Heureusement, on peut embrayer sur la zik, il aime ça, il joue de la basse (là il se la joue guitar hero - il tape une gratte invisible de la paume de la main droite, ses yeux regardent déjà à l'intérieur de lui la marée de têtes du public qui balancent sur son beat... top contraste avec son uniforme noir et blanc collet monté !). Je suis accoudé sur le comptoir, marrant cet hôtel, on sait accueillir le client ! Il me dit qu'il finit son service à 22h, si je l'attends, il m'emmène vers Freetown, dans un bon bar avec des groupes qui passent tout le tps. J'ai pas de Lonely, je peux pas checker si ça craint comme quartier. Je suis vraiment un tarré d'accepter sans me renseigner ! dans une ville pareille !!

Pour mon pote garçon d'accueil, c'est royal, j'offre le taxi, il a une patate, il chante et blague en xhosa avec le taximan. Tu m'étonnes qu'il soit content de se faire voiturer, il y a des files et des files de gars le long des arrêts de bus le long de murs en planches de guingois, derrière on construit des malls et des gratte-ciels de bureau. On sort du quartier de l'hôtel, ça devient des rangées de cubes, des préfabriqués, assez nets, mais qd même minus, c'est les maisons du gouvernment de l'apartheid pour stocker les noirs. des casiers à lapins pareils, ça relève pas l'image que j'avais des afrikaneers de cette époque sordide. Mais c'est pas fini, on roule encore. Bon dieu, il est où ce bar. Je veux rentrer !!! On arrive à un quartier plus désordonné...et encore plus misérable. J'ai pas vu bcp de bidonvilles ds ma vie, ms celui là ressemble pas mal : des portes en sacs de riz ouverts aux coutures, des toits très bas de guingois en tôle cabossée, des poulets bicyclettes qui filent sous les roues du taxi dans les ornières poussiéreuses. Et des lambeaux de sacs plastiques absolument partout autour par terre, en étendards déchirés ans les buissons, en fleurs bleus et noires dans les tas de gravas. Ouf, on fait que traverser. On revient sur une artère un peu plus large. Le gars de la réception me flanque une grande tape ds le dos, hey

C'est là que ça se gâte. C'est là que les Athéniens s'éteignirent comme disait le paternel. Le taxi fait une embardée, un 4x4 pare-buffles chromé déboule de la droite, d'une ruelle complètement obscure. Je suis pas passé loin de finir comme un rhinocéros accroché dans le salon de ces maboules. J'insulte en hurlant ce macaque à ray ban fumées qui doit conduire son tank sans permis. Mais les locaux me retiennent d'ouvrir la portière. De toute façon l'autre con a filé et on risque pas de le rattraper avec notre moteur qui a dû déjà s'enfiler 250 000 km. Une grappe de gens déboulent de la ruelle en braillant, des femmes aux yeux révulsés, les fichus de traviole, le pagne crispée dnas la main, elles hurlent à la poursuite du 4x4 qui a filé depuis longtemps. Ni une ni deux, le taxi fait demi tour, ça sent vraiment trop mauvais. Il revient en faisant un méga détour, prenant que les grands axes, des 2x2 voies éclairées. Je dis plus rien, je crois que pour le concert c'est râpé. Le taxi et le gars de l'hôtel appellent en xhosa tous leurs potes. Des tas et des tas de syllabes entrecoupées de clics de langue après, ils raccrochent leurs Nokias dernier cri. Enfin ils se rappellent de moi. En fait, les enfoirés du 4x4 ont buté une maman dans le quartier : ce matin au marché, de l'huile de friture de cette maman glougloutait dans une poêle noire cabossée, la "copine" du mec du 4x4 lui commande un beignet aux crevettes...et la maman envoie des gouttes d'huile bouillante sur le jeans faux calvin klein de la poupée. La sanction n'a pas traîné et l'affaire vient de se régler juste sous mon nez. C'est plié pour moi Jo'burg. Je vais rester cloîtrer à bosser pour Mariën, le cul sur la moquette, ça vaudra mieux pour tout le monde.

ton Bruno, bien secoué

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